Poesies enfant

Le fugitif




A l’heure où le soleil va se cacher à l’horizon derrière les mûriers et les ormes,
Je me mettais en marche, inondé de lumière par ses derniers rayons ;
J’allais, parcourant le tableau changeant des montagnes et des rivières,
Et tout à coup je me suis trouvé sous un autre ciel.

Devant mes yeux passent toujours de nouveaux peuples et de nouvelles familles :
Mais, hélas ! mon pauvre village ne se montre pas !
Tandis que le grand Kiang pousse vers l’Orient des flots rapides que rien n’arrête,
Les jours de l’exilé s’allongent, et semblent ne plus s’écouler.

La ville à double enceinte est remplie de maisons fleuries,
Et, jusqu’au cœur de l’hiver, les arbres y conservent leur verte couleur.
Le mouvement y est incessant ; tout y révèle la cité fameuse,
Où, de toutes parts, les joueurs de flûte remplissent l’air de sons joyeux.

Elle est certainement belle la ville à double enceinte, mais je n’y ai pas un ami dont le toit soit mon refuge.
J’incline la tête ; je contemple vaguement la perfection du fleuve et de ses ponts.
Les oiseaux, quand le soir vient, retrouvent chacun leur tranquille retraite,
Et, pour moi, ce vaste empire n’est plus qu’un immense désert.

La lune naissante ne jette encore qu’une faible lumière,
Et de nombreuses étoiles rivalisent avec elle d’éclat.
Depuis les temps anciens, que de fugitifs comme moi ont parcouru la terre étrangère !
Ai-je bien le droit de me plaindre de mes malheurs ?





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