Le poète voit en songe son ami Li-taï-pé Si c’est la mort qui nous sépare, je devrais rendre ma douleur muette ; Si nous ne sommes séparés que par la distance, mon chagrin doit élever la voix. Hélas ! le climat du Kiang-nan est le plus meurtrier des climats ; Et mon ami est dans le Kiang-nan, et je suis sans nouvelles de lui. Mon ami m’est apparu en songe, Car nos esprits se cherchent constamment ; Mais l’esprit qui m’a visité, était-ce l’esprit d’un homme vivant ? La route de Kiang-nan est si longue que ce doute cruel ne peut, de longtemps, être éclairci. L’ombre s’est avancée, au milieu d’un bois verdoyant ; Puis je l’ai vu s’éloigner, et franchir de sombres barrières. O mon ami ! m’écriai-je, vous qui étiez dans les liens, Où donc avez-vous pris des ailes, pour voler aujourd’hui près de moi ? Je m’éveillai. La lune inondait ma chambre de sa blanche lumière ; Puis-je espérer qu’elle éclaire aussi celui dont je suis séparé ! Et, s’il a recouvré sa liberté, que de dangers le menacent encore ! Les barques sont si fragiles, les monstres marins si féroces et les flots si profonds !
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